Ed. La Veytizou NPL, 2008, 382 p., 22€
Commençons par le commencement : ce récit, entièrement autobiographique, raconte la jeunesse de quelqu'un que j'ai bien connu, mon oncle maternel. Ne cherchez donc pas d'objectivité dans cet article, il n'y en a aucune !
J'ai simplement beaucoup aimé ce récit parce qu'il parle de mes grands-parents, de ma grand-mère surtout, une sacrée femme (remarquez que je n'ai pas dit "bonne femme", un terme que je trouve un tantinet macho, j'aurais aussi pu dire une femme exceptionnelle), de mes arrière-grands-parents, sur lesquels j'ai appris tout un tas de choses que j'ignorais complètement. Oubliées par ma pauvre mémoire ou oubliées dans les récits familiaux ? Je ne le saurai jamais et je m'en fous, finalement, puisque ce récit me les apprend.
Mon oncle s'y donne le beau rôle, normal puisqu'il en est le héros, un héros à la taille de son égo qui n'était pas mince, à juste titre car il était fort intelligent. Ma mère, sa sœur, l'était tout autant mais elle était plus modeste et n'a jamais été tentée par l'autobiographie.
Je pense que ce témoignage sur une période allant de 1922 à 1945 à travers la vie d'un jeune homme lambda (qui, au moment où il rédigea ses mémoires, était devenu un militant d'extrême gauche) nous rappelle combien nous sommes de petites choses ballotées par le destin. L'Histoire, avec un grand H, se fout des hommes, elle les broie et nous le voyons quotidiennement. Alors, quand certains se dressent avec courage et dignité, il ne faut pas les oublier. C'est ce qui firent mes grands-parents qui cachèrent au collège dont mon grand-père était le principal(avec l'aide des professeurs), des enfants juifs, ce que fit mon oncle en s'engageant (les derniers mois de la guerre parce qu'il avait 22 ans et déjà 2 enfants et une femme) dans la Résistance, ce qui fit ma grand-mère en organisant la fuite des Feigenbaum, la famille juive de sa belle-fille ... ce que fit ma mère, Annie, qui du haut de ses 11 ans ne révéla jamais rien sur son frère alors qu'elle savait qu'il avait fui le STO et se cachait à Marseille.
Dans ma mémoire mélangeuse, mon oncle avait sauté du train en marche qui l'emmenait au STO, refusant de travailler pour l'ennemi allemand, quel héros ! Ce faisant, il s'était même blessé au genou. Mais non, j'ai été étonnée d'apprendre qu'il s'est simplement caché à Marseille en travaillant à gauche à droite pour nourrir sa famille et que ce fut sa première préoccupation. Jusqu'aux derniers mois de la guerre où il devint résistant et secrétaire d'un militaire de l'armée de libération.
Les souvenirs de l'arrière boutique du grand-père pharmacien et de ce personnage plein de bonté sont délicieux. Comme le sont les merveilleux souvenirs d'enfance lorsque celle-ci a été heureuse.
J'ai redécouvert ma fabuleuse grand-mère Germaine, au caractère bien trempé, décidé et plein d'énergie.
Plus âgée, quand mon grand-père a été à la retraite, on disait dans la famille qu'elle "portait la culotte". Mon grand-père était un calme, presque taiseux et cela donnait un certain équilibre à leur couple ! Mais c'était lui le penseur et elle l'organisatrice, chacun avait son rôle, complétait l'autre et y trouvait son compte.
Je garde ce livre précieusement pour mes enfants, j'espère qu'un jour, ayant vieilli, ayant du temps, ils le trouveront et auront envie de se plonger dans la vie de leurs ascendants. Ils pourront être fiers d'eux.
En couverture, un tableau de mon père, soigneusement renseigné comme "Aux fusillés de Chateaubriant- peint en 1947 par le peintre engagé Christian Maillet" mais de lui je ne parlerai pas. Je ne pensais pas trouver cette première de couverture dans google images mais oui !
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