Stock, 2021, 18,50€
Histoire d'une famille dont le 3e enfant subit un double handicap, mental et physique.
Chaque membre de la famille doit s'adapter à l'enfant (il sera toujours appelé l'enfant, on ne saura jamais son prénom), à la situation. L'aîné du couple prend instinctivement en charge une partie des contraintes et assume ce que les autres ne peuvent assurer ponctuellement. La cadette, elle se défend et entre en guerre, en colère contre l'injustice faite à son petit frère et à elle même, elle ne s'en occupe jamais et l'ignore. Jusqu'au jour où elle aussi, devant ses parents et son grand frère ravagés par le chagrin et entrain de s'éloigner irrémédiablement les uns des autres, décide de maintenir à flot sa famille, méthodiquement, à 100%. Et avec quel succès ! Tout cela impacte leur vie et les change profondément. Parfois en bien (aller vers l'inconnu, ne plus avoir peur de rien puisque le pire est déjà arrivé pour la cadette), parfois en mal (repli sur soi, crainte phobique des dangers pour l'aîné).
Une belle histoire familiale où le couple des parents tient le coup grâce aux enfants.
En fin d'histoire arrive un 4e enfant qui sera lui aussi marqué par l'absent mais qui réussira à trouver sa place.
Certains n'aimeront peut être pas le style, dépouillé et simple mais, pour moi, il traduit tellement bien les sentiments ...
Un très beau récit, empreint d'humanité, où le chagrin (que tous ceux qui ont perdu un être cher connaissent) devient force de vie. Une belle leçon qu'on aimerait pouvoir suivre !
Quelques passages qui m'ont touchée :
- p.15 ... "Bientôt les parents parleraient de leurs derniers instants d'insouciance, or l'insouciance, perverse notion, ne se savoure qu'une fois éteinte, lorsqu'elle est devenue souvenir."
- p. 64 ..."Pour toujours son frère est mort la veille. On lui a répété que le temps répare. En vérité, il le mesure lors de ces nuits, le temps ne répare rien, au contraire. Il creuse et ranime la douleur, chaque fois un peu plus intense. C'est tout ce qui lui reste de l'enfant, le chagrin. Il ne peut pas s'y soustraire ; cela voudrait dire perdre l'enfant définitivement."
- p.117 ... "elle comprit soudain que son frère aîné ne guérirait pas de l'enfant. Guérir cela signifiait renoncer à sa peine, or la peine, c'était ce que l'enfant avait planté en lui. C'était sa trace. Guérir , cela voulait dire perdre la trace, perdre l'enfant à tout jamais. Elle savait désormais que le lien peut avoir différentes formes. La guerre est un lien. Le chagrin aussi."
- p.143 ..."Son histoire familiale était pleine de trous. Et justement, il aimait l'Histoire parce que la sienne lui échappait."
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