Bienvenue à tous ceux qui aiment lire ...

Lire, pour moi, c'est échapper au quotidien tout en restant proche des hommes et de leurs réalités ...

jeudi 14 décembre 2023

Bastards d'Ayerdhal

 Au diable Vauvert, LDP, 2016, 644 p.

Étrange roman, fantastique et féministe, violent et animal. Il passe d'une histoire compliquée d'espionnage aux métamorphoses étonnantes d'une famille composée uniquement de femmes. Une revanche sur l'oppression séculaire du patriarcat ! Mais voilà une histoire que je serais bien en peine de vous résumer, il faut simplement la lire et voir si ça vous plait. 

La 4e de couv indique "L'écrivain new-yorkais Alexander Boyd ne parvient plus à écrire depuis qu'il a été récompensé par le prix Pulitzer. Il se lance à la recherche de celle que les médias surnomment Cat-Oldie, une vieille dame qui s'est débarrassée de trois agresseurs avec un outil de jardin et l'aide d'un chat. Sa quête se transforme en une véritable investigation qui ravive la guerre entre services spéciaux ..."

A partir de là, tout se complique singulièrement et je comprends que celle ou celui qui a dû rédiger une accroche alléchante se soit arrêté rapidement !

J'ai été interloquée par ce roman, conseillé par mon amie Marie, mais je dirai que je l'ai aimé rien que parce qu'il a aiguillonné mon côté féministe.

A lire donc. 

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Les hurlements de la vie de Jacques Jurquet

 Ed. La Veytizou NPL, 2008, 382 p., 22€

Commençons par le commencement : ce récit, entièrement autobiographique, raconte la jeunesse de quelqu'un que j'ai bien connu, mon oncle maternel. Ne cherchez donc pas d'objectivité dans cet article, il  n'y en a aucune !

J'ai simplement beaucoup aimé ce récit parce qu'il parle de mes grands-parents, de ma grand-mère surtout, une sacrée femme (remarquez que je n'ai pas dit "bonne femme", un terme que je trouve un tantinet macho, j'aurais aussi pu dire une femme exceptionnelle), de mes arrière-grands-parents, sur lesquels j'ai appris tout un tas de choses que j'ignorais complètement. Oubliées par ma pauvre mémoire ou oubliées dans les récits familiaux ? Je ne le saurai jamais et je m'en fous, finalement, puisque ce récit me les apprend.

Mon oncle s'y donne le beau rôle, normal puisqu'il en est le héros, un héros à la taille de son égo qui n'était pas mince, à juste titre car il était fort intelligent. Ma mère, sa sœur, l'était tout autant mais elle était plus modeste et n'a jamais été tentée par l'autobiographie.

Je pense que ce témoignage sur une période allant de 1922 à 1945 à travers la vie d'un jeune homme lambda (qui, au moment où il rédigea ses mémoires, était devenu un militant d'extrême gauche) nous rappelle combien nous sommes de petites choses ballotées par le destin. L'Histoire, avec un grand H, se fout des hommes, elle les broie et nous le voyons quotidiennement. Alors, quand certains se dressent avec courage et dignité, il ne faut pas les oublier. C'est ce qui firent mes grands-parents qui cachèrent au collège dont mon grand-père était le principal(avec l'aide des professeurs), des enfants juifs,  ce que fit mon oncle en s'engageant (les derniers mois de la guerre parce qu'il avait 22 ans et déjà 2 enfants et une femme) dans la Résistance, ce qui fit ma grand-mère en organisant la fuite des Feigenbaum, la famille juive de sa belle-fille ... ce que fit ma mère, Annie, qui du haut de ses 11 ans ne révéla jamais rien sur son frère alors qu'elle savait qu'il avait fui le STO et se cachait à Marseille.

Dans ma mémoire mélangeuse, mon oncle avait sauté du train en marche qui l'emmenait au STO, refusant de travailler pour l'ennemi allemand, quel héros ! Ce faisant, il s'était même blessé au genou. Mais non, j'ai été étonnée d'apprendre qu'il s'est simplement caché à Marseille en travaillant à gauche à droite pour nourrir sa famille et que ce fut sa première préoccupation. Jusqu'aux derniers mois de la guerre où il devint résistant et secrétaire d'un militaire de l'armée de libération.

Les souvenirs de l'arrière boutique du grand-père pharmacien et de ce personnage plein de bonté sont délicieux. Comme le sont les merveilleux souvenirs d'enfance lorsque celle-ci a été heureuse.

J'ai redécouvert ma fabuleuse grand-mère Germaine, au caractère bien trempé, décidé et plein d'énergie.

Plus âgée, quand mon grand-père a été à la retraite, on disait dans la famille qu'elle "portait la culotte". Mon grand-père était un calme, presque taiseux et cela donnait un certain équilibre à leur couple ! Mais c'était lui le penseur et elle l'organisatrice, chacun avait son rôle, complétait l'autre et y trouvait son compte.

Je garde ce livre précieusement pour mes enfants, j'espère qu'un jour, ayant vieilli, ayant du temps, ils le trouveront et auront envie de se plonger dans la vie de leurs ascendants. Ils pourront être fiers d'eux.

En couverture, un tableau de mon père, soigneusement renseigné comme "Aux fusillés de Chateaubriant-  peint en 1947 par le peintre engagé Christian Maillet" mais de lui je ne parlerai pas. Je ne pensais pas trouver cette première de couverture dans google images mais oui !

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Livre : Les hurlements de la vie, le livre de Jacques Jurquet - Ed. de La  Veytizou - 9782351920534




La gitane aux yeux bleus de Mamen Sànchez

 trad. de l'espagnol Judith Vernant, Folio, Mercure de France, 372 p.

Déception. Je cherchais un petit roman distrayant et rigolo, beaucoup de critiques et d'avis le donnaient tel. Pas pour moi ... Je n'y ai pas trouvé l'irrésistible humour promis, l'histoire m'a ennuyée, les personnages caricaturaux m'ont laissée indifférente et le fameux "choc des cultures" rassemblait tous les poncifs sur l'opposition nord/sud.

Si seulement je l'avais lu en espagnol, j'y aurais trouvé un intérêt !

Je suis sûrement un peu dure, alors je ne mettrai pas de @. Je vais simplement le donner !

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Les disparus de la lagune de Donna Leon

 trad. de l'anglais Gabrielle Zimmermann, Points, 2023, 352 p.

Un bon petit polar, bien mené et à la conscience écologique. Ben, que demander de plus ?

Le commissaire Brunetti est surmené, craignant de commettre une erreur dans l'exercice de ses fonctions, il décide de s'offrir un petit séjour dans l'île de Sant'Erasmo, dans la lagune vénitienne. Se remettre au bateau (ramer), oublier son métier et ses soucis quelques temps, mener une vie saine et solitaire, voilà son projet. Projet encouragé par sa femme.

Hélas, quand le gardien de la maison qu'on lui a prêtée disparait brusquement, il se sent obligé de mener l'enquête. Il découvre que la lagune cache de bien sombres secrets.

Pour se divertir sans oublier tout à fait notre monde si imparfait, idéal pour les vacances.

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Une Enquête du Commissaire Brunetti - Disparus de la lagune (Les) - Donna  Leon - Poche - Achat Livre | fnac

Scarlet et Novak d'Alain Damasio

 Rageot, 2021,52 p., 5,10€

Une nouvelle, un récit très court que m'avait prêté mon amie Ghislaine. Encore un choix comme elle savait les faire, intéressant, prenant, réfléchi mais aussi littéraire. Celui là non plus, comme Pachinko, je n'ai pu le lui rendre mais je le garde, en souvenir d'elle, j'ai besoin de garder ce lien avec elle. Ne pas chercher de véritable logique dans ce geste sinon celle de l'affection ...

Chez Damasio, rien n'est jamais gratuit, le récit a toujours du sens. Ici, il dénonce la place du numérique et du virtuel dans nos vies en en accentuant l'importance. 

Novak n'a d'échange et de vie qu'à travers son "brightphone", Scarlet. Parti courir il se fait agresser. Qui va l'aider ? Sûrement pas Scarlet ...

Bien ficelé, la nouvelle porte son message et nous interpelle. 

A étudier au lycée pour faire réfléchir les jeunes adeptes des smartphones à outrance.

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Scarlett et Novak sur Apple Books

Pachinko de Min Jin Lee

 trad. de l'anglais Laura Bourgeois, Charleston, 2021, 622 p., 23,90€

Mon amie Ghislaine m'avait prêté ce gros roman qu'elle avait aimé. 

Je pensais le lui rendre en septembre, j'ai laissé passer le temps. Elle est décédée d'une crise cardiaque le mardi 26 ... Je n'ai jamais pu lui dire que, comme elle, j'avais aimé ce roman et pourquoi, je n'ai pu la remercier de me l'avoir conseillé et prêté. 

Ghislaine trouvait toujours des pépites, des romans qu'elle me donnait envie de lire, nous avions les mêmes goûts, exactement, et je savais que je pouvais y aller les yeux fermés. Jamais je n'ai été déçue.

C'était une de ces scientifiques à la fibre littéraire ... Combien elle me manque ! Je lis souvent en pensant à elle, me demandant ce qu'elle en aurait pensé, si elle aurait eu envie de lire cet ouvrage. Je pense souvent à elle pour plein d'autres choses évidemment mais la culture, lecture, théâtre, musique, danse, c'était elle. Je l'ai entraînée sur la route des séries télé et même là, où j'avais commencé bien avant elle, elle m'a conseillé des trucs chouettes. 

Son intelligence me manque.

Mais revenons à Pachinko.

J'ai vu l'adaptation en série avant de lire le roman. Je l'avais beaucoup aimée et la curiosité m'a poussée à lire quand même le roman. Je n'ai pas été déçue, l'adaptation était fidèle et le temps ayant quelque peu effacé les péripéties de ma mémoire, j'ai redécouvert avec bonheur l'âme et l'ambiance de cette histoire d'émigrés coréens au Japon.

Une histoire jalonnée d'épreuves, de malheurs, de souffrance dues au racisme, à la pauvreté, à la violence des sociétés capitalistes. Mais l'héroïne, Sunja, trouve en elle la force de toujours continuer, de toujours garder sa dignité et de se battre pour ceux qu'elle aime. Un beau portrait de femme, encore un bien sûr, mais je ne m'en lasse pas tellement il faut rendre enfin justice aux femmes du passé, même récent.

On plonge dans Pachinko sans lever les yeux, sans souffler, en oubliant le monde même si le style (bien sûr c'est une traduction) n'est pas exceptionnel. Parce que le roman nous importe pour ce qu'il raconte des éternels soucis des femmes, à travers les époques, à travers le monde, pour ce qu'il nous dit de leur force et de leur courage.

A lire et à voir en série, les 2 valent le détour !

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Pachinko – Editions Charleston

 


Notre part de nuit de Mariana Enriquez

trad.de l'espagnol (Argentine) par Anne Plantagenet, Points, 2023

Un gros roman plein de violence, de peurs, de fantastique, d'horreur et ... de dénonciation des dictateurs et de leurs méfaits. De quoi trembler le soir et cauchemarder la nuit d'autant que la réalité historique et argentine a largement inspiré l'auteure.

Un père aux pouvoirs étranges et son tout jeune fils fuient dans la nuit. Qui fuient ils ? Pourquoi ? 

Gaspar, l'enfant, a hérité de son père le terrible pouvoir des médiums. Une société secrète les recherche afin de percer les secrets des forces des ténèbres et de l'immortalité ... Coup de génie de l'autrice qui mêle alors politique et fantastique : les leaders de cette société secrète appartiennent à de très riches familles argentines, favorables à la dictature. Ceux qui s'opposent à eux sont menacés de mort (tout comme par les tenants de la dictature argentine en son temps) et disparaissent sans explication, offerts aux ténèbres avides de vies humaines . Le parallèle est parlant !

Un roman qui donne des frissons, qui fait trembler mais qui nous guide aussi par de beaux moments poétiques et sensibles. Étrange et beau !

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Notre part de nuit

Marseille 73 de Dominique Manotti

 Points, 2022, 7,95€

Années 70, Marseille. Le jeune commissaire Daquin vient d'être nommé à l'Evéché, hôtel de police, où personne ne parle des crimes racistes qui se multiplient. Lui décide d'enquêter, envers et contre tous ou presque. Il découvre un réseau de policiers "pieds noirs" racistes qui se sont rapprochés géographiquement après la fin de la guerre d'Algérie par le biais des mutations internes et qui font leur loi ... Comment démonter ce réseau, comment trouver de l'aide auprès de policiers honnêtes, comment prouver les crimes commis ? 

Surtout lorsqu'on est homosexuel à Marseille, ville machiste à cette époque ...

Un roman policier très construit qui rappelle une histoire encore récente et brûlante.


Marseille 73 - Poche - Dominique Manotti - Achat Livre | fnac