Eureka Street de Robert McLiam Wilson

 trad. Brice Matthieussent, 10/18, 544 p., 1999

Un délice ! Humour grinçant ou décalé, les personnages d'Eureka street vont vous faire rire et réfléchir et vous n'aurez de cesse de savoir ce qui va leur arriver.

Belfast, dans les années 1990, à la fin du conflit nord-irlandais. 

• Jake Jackson, le narrateur, travaille à la récupération des objets impayés dans le Belfast pauvre des années 1990, travail qu'il déteste. Ancien étudiant orphelin, d'origine catholique mais non croyant, coutumier des bagarres (il est sujet à des bouffées de colère), Jake est pourtant pacifiste et romantique. Sa petite amie Sarah, anglaise, l'a quitté il y a 6 mois, fuyant l'insécurité de Belfast et il s'en remet difficilement.
  
• Chuckie Lurgan est l'ami de Jake. D'origine protestante, il fréquente plutôt les milieux catholiques. A trente ans, constatant qu'il n'a rien fait de sa vie, il décide de gagner de l'argent, et il ne manque pas d'idées ni de talent pour réaliser ses plans. Pour lui, tous les moyens sont bons puisque le monde fonctionne de façon injuste et absurde.
  
• Crab et Hally, sont des collègues violents travaillant avec Jake à la récupération. Ils ne sont pas ses amis !
  
• Max, est une jeune américaine, fille d'un diplomate américain assassiné à Belfast, elle sort avec Chuckie.
• Aoirghe Jenkins, militante catholique, amie de Max, par ses positions extrémistes est en constant désaccord avec Jake.
• Roche, est un jeune garçon traînant dans les rues de Belfast. dont on ne sait pas grand chose jusqu'à ce qu'on découvre son quotidien sordide.

Un roman à lire absolument !

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Une sardine à la mer de Guillaume Long

Ed. Ici MÊME, 2019, 24€
Une BD très marrante sur la vie d'étudiant aux Beaux Arts de St Etienne de l'auteur ...
Humour décalé et second degré où le poncif de l'étudiant fêtard et insouciant est battu en brèche.
Place à l'étudiant éternellement fauché, anxieux de ses résultats (en recherche d'idées créatrices originales sinon farfelues) et qui a peu de succès auprès des filles ...
A lire !
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Bacchantes de Céline Minard

Payot et Rivages, 2019, 13,50€
Difficile de qualifier ce court roman tant il est farfelu, débridé et ... jouissif !
On découvre petit à petit ce gang de braqueuses foutraques qui n'en font qu'à leur tête sans se soucier des conséquences de leurs actes.
On ne sait ni pourquoi elles s'attaquent précisément à ces bunkers où sont stockés des vins rarissimes ni quelles sont leurs motivations personnelles. Mais ça fait plaisir ;o)
Sont ils le symbole d'un libéralisme échevelé, de différences de classes sociales qui s'accentuent ?
De l'individualisme forcené des nantis ?
Elles ont surement eu à souffrir d'une société inégalitaire et violente, en tant que femmes et en tant qu'être humain venant d'un milieu modeste ... l'une fait le clown, l'autre fait la très belle et la dernière est une super woman de combat.
Chacune à sa manière brame sa révolte, désespérément, sans chercher de véritable issue.
Je ne sais pourquoi, la lecture de Bacchantes m'a rappelé la série "La casa de papel" et son côté iconoclaste, ni Dieu ni maître et viva la muerte !
Le style de Céline Minard reste direct et imagé, son amour de ses personnages reste entier. C'est pour ça qu'on l'aime tant.
A lire, pour le plaisir
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Glaise de Franck Bouysse

LDP, 2018, 7,90€
Eté 1914, tous les hommes valides partent au front. La chaleur est lourde dans le Cantal où femmes et enfants triment dur pour assurer les travaux de la ferme.
Joseph 15 ans travaille durement comme son père le faisait avant de partir à la guerre en emmenant son cheval de trait.
Dans la ferme voisine, Valette, un paysan dominé par ses pulsions, aigri et violent, vient d'accueillir sa belle sœur et sa nièce, la belle Anna. Le drame va se nouer ...
F.B nous offre une chronique de la vie paysanne imprégnée de la rudesse du climat et du travail. A cette rudesse répond la violence des passions et des sentiments. Fiction et réalisme s’entremêlent jusqu'à rendre l'ambiance étouffante et lourde de la campagne en temps troublés.
Le rôle des femmes, leurs souffrances et leur importance sont au centre du roman.
Un très beau récit qui rend bien compte de la complexité de l'âme humaine, de sa diversité, de sa dualité. En l'être humain cohabitent le meilleur et le pire ... dans cet ordre ?
F. Bouysse a obtenu le prix polar SNCF pour "Grossir le ciel" et le grand prix des lectrices de Elle pour "Né d'aucune femme". A suivre ...
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Underground railroad de Colson Whitehead

trad. Serge Chauvin, Albin Michel, coll. Terres d'Amérique, 2017, 397 p., 22,90€
Quelle bonne surprise ! Quelle lecture passionnante !
Elle réunit tout ce que j'aime : l'histoire avec un grand H et histoire personnelle.
Juste avant la guerre de sécession, Cora une jeune esclave sur une plantation de coton de Géorgie tente de s'enfuir pour gagner les états libres du Nord. Elle est aidée par l'Underground Railroad, un réseau clandestin très organisé au sein duquel se retrouvent anti esclavagistes de tous horizons. Des personnes qui risquent leur vie au même titre que les esclaves qui fuient ...
Description des conditions de vie des esclaves, du racisme, des mauvais traitements, description de ceux qui aidaient les esclaves à s'enfuir, blancs et noirs libres, description de l'état d'esprit dans ces états esclavagistes ... on apprend tant de choses et on a hâte de suivre les pérégrinations de Cora !
Le roman a obtenu le prix Pulitzer de la fiction et le National book Award en 2017.
Mêlant fiction et faits historiques, l'auteur analyse les mécanismes du racisme et de l'esclavage économique avec brio, alors qu'on pense ne plus avoir à découvrir grand chose sur le sujet.
Captivant et poignant.
Un vrai coup de cœur ! Une belle lecture, indispensable.
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Murène de Valentine Goby

Actes Sud, 2019, 21,80€
Hiver 1956 (l'année de ma naissance !). Après une électrocution accidentelle à laquelle il survit miraculeusement, François, 22 ans, perd ses deux bras.
Désespoir, révolte, acceptation et renaissance. Voilà à peu près résumé son long cheminement que décrit magnifiquement et avec beaucoup d'humanité l'autrice.
Un parcours compliqué et douloureux, où même les petits tracas de la vie quotidienne sont évoqués. Bien sûr on ne rit pas à la lecture de ce roman mais on suit sans difficulté le récit tant le style est beau, frappant et émouvant.
Et puis, V.G part toujours du corps, des sensations, de ce que l'on perçoit par et à travers lui. Ce corps omniprésent dans nos vies qui parfois nous tourmente mais nous apporte aussi tant de belles sensations, tant de belles émotions.
On suit l'évolution des techniques de prothèses, on suit la création et l'histoire du handisport et des jeux paralympiques. Et par le sport, arrive enfin le miracle de la résilience.
Au détour du récit, émergent les différences de classes, apparaissent les fermetures d'entreprises et le chômage qu'elles entraînent dans les Ardennes.
Humanité ...
A lire absolument, merci à Joëlle qui me l'a prêté !
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Entre deux mondes d'Olivier Norek

Michel Lafon, 413 p., 2017,  19,95€
Non seulement il faut déjà arriver à Calais mais il faut survivre dans la jungle ...
Ce polar d'O. Norek entrelace habilement plusieurs destins, prétextes à décrire la vie dans la jungle, démantelée en octobre 2016.
Pour ce faire, il a enquêté auprès des migrants eux mêmes, des associations, des journalistes et des policiers.
Du coup, il émane du polar une logique implacable : du manque d'hygiène et des conditions de vie éprouvantes, du manque de nourriture, de vêtements, de médicaments et d'activité surtout naissent violence, viols, rackets etc.
Les communautés se partagent le pouvoir, Afghans, Soudanais, Libyens s'affrontent et se tuent si besoin, avec leur lot de victimes collatérales.
La vie dans les camps de réfugiés, tous les camps de réfugiés, est terrible.
Malgré tous les efforts des associations et des bénévoles, toute la misère morale et matérielle est là.
Et la police doit faire régner un semblant d'ordre. Dur boulot, sale boulot car il faut parfois laisser faire, fermer les yeux ou sévir en sachant que demain il faudra recommencer et recommencer et recommencer ... dans un cycle sans fin et sans vraie solution. Certains flics ont encore des sentiments humains et du coup, des états d'âme. C'est le cas du héros du roman, Bastien Miller. Un flic au grand cœur qui va réussir à créer une vraie équipe autour de lui.
Un très beau polar, imprégné d'humanité. Et de générosité !
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Les petites reines de Clémentine Beauvais

 Sarbacane, 2019, 271 p.

Un roman tonique et décomplexant comme une de ses héroïnes, Mireille Laplanche.

Elèves au lycée Marie Darrieusecq, elles sont grosses, ah non, pardon : "en surpoids", un imbécile les traite de "moches" mais elles ont un cerveau qui fonctionne à la perfection, des mollets qui moulinent fort bien et de la volonté.

Elues "boudins de l'année", 3 filles décident sous la houlette de Mireille Laplanche de se rendre de Bourg en Bresse où elles vivent à Paris, en vélo, créant un buzz médiatique sans précédent. L'une désire voir son père qu'elle ne connait pas, l'autre veut aller à l’Élysée poser une question au Président, la dernière suit ses copines.

Un joli roman plein d'humour, optimiste, généreux, qui donne envie de pédaler à toute vitesse !

Dès 12 ans. 

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Les rues de Santiago de Boris Quercia

 trad. B. Chardon, 2015, LDP, 164 p.

Un roman très très très noir, dans la tradition du noir, avec un flic désabusé qui cherche un sens à sa vie.

Après avoir malheureusement tué un jeune délinquant inexpérimenté lors d'une opération, Santiago Quinones erre dans Santiago du Chili, le moral en berne, en crise existentielle. Il croise alors la route de la belle Ema Marin, courtière en assurance, qui connait tout de lui ...

Cette rencontre va lui coûter cher et l'imbroglio dans lequel il va mettre le nez le met en danger de mort.

Un personnage principal à peine sympathique, une femme fatale vénale, une autre dépassée par les évènements, une ville d'ombres et de trafics, la corruption et la violence : il faut avoir le moral pour lire

ce rude polar. Mais il vaut le coup !

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Le maître des illusions de Donna Tartt

 Richard Papen arrive tout droit d'un patelin de Californie où il étouffait dans une famille très peu communicative. Il va étudier à l'université de Hampden, dans le Vermont, petite université traditionnelle, grâce à une bourse obtenu difficilement.

Un peu perdu, ne sachant pas vraiment vers quoi diriger ses études, il découvre un petit groupe d'étudiants en grec classique et leur professeur, Julian Morrow qui le fascinent. Il découvre avec eux une classe sociale huppée et riche, un monde insoupçonné de luxe, d'arrogance intellectuelle, de sophistication mais aussi d'hypocrisie, de lâcheté, d'addictions.

Il pressent qu'un secret inavouable lie Francis, Henry, Charles et Camilla les jumeaux. Bunny, le plus sympathique, en semble exclu. Petit à petit, Richard s'intègre de mieux en mieux à ce petit groupe et parvient à reconstituer les faits. Des faits épouvantables ...

Il est plus facile de définir le maître des illusions par ce qu'il n'est pas que par ce qu'il est ! Contrairement aux apparences, il ne s'agit ni d'un polar, ni d'une étude strictement psychologique. C'est un subtil mélange d'étude de mœurs, de société et de personnalité, où la culture grecque antique sert à broder finement une réflexion philosophique sur les rapports humains et sociaux.

Beaucoup d'ambiance dans ce roman noir, parfois haletant, où l'on retrouve un monde universitaire débridé (déjà souvent décrit dans les romans américains, par ex Les revenants de J. C. Oates) et à l'opposé du puritanisme américain. 

J'ai adoré.

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