Sabine Wespieser Éditeur, 2010, 489 p., 24€
L'histoire démarre en 2001, en Jamaïque. Michel Ferlié, un patron issu d'une vieille famille de soyeux lyonnais, a invité quelques parisiens branchés. Un "jeune qui monte à la télé" tient un discours négationniste, face à un homme dont le grand-père fut déporté à Mauthausen ... Voilà rassemblés les ingrédients du récit.
Vincent Borel alterne alors deux récits s'étalant des années 20 à la seconde guerre mondiale, l'histoire de sa propre famille d'origine espagnole et l'histoire vraie des Gillet, grands patrons à Lyon.
Bien que d'origine très modeste, les deux familles vont faire des choix et connaitre des destins bien différents qui permettent de retracer cette période mouvementée.
Les grands-parents de l'auteur, Antonio et Isabel dont les familles ont fui la misère pour s'installer à Barcelone, vont s'y marier. Antonio deviendra communiste, se battra pour le progrès social, verra la France et l'Angleterre refuser leur aide à la jeune République espagnole, se battra contre l'armée de Franco ... jusqu'à la défaite. Alors, le jeune couple et ses enfants devra quitter l'Espagne pour s'exiler en France, arrivera de justesse à éviter les terribles camps français et Antonio, entré dans la Résistance, sera déporté à Mauthausen. Il en reviendra changé à jamais et devenu "Antoine", il emmènera régulièrement ses enfants et petits enfants visiter le camp ... devoir de mémoire !
Un canut de Lyon, grâce à son ingéniosité et sa curiosité, utilise des procédés chimiques nouveaux dans les textiles et fait fortune. Les Gillet, devenus des patrons paternalistes et durs, dès le début favorables à Hitler, vont se répartir habilement la tâche : le gendre collaborera avec les allemands, allant même jusqu'à produire pour eux du Zyklon B (pour les chambres à gaz) tandis que les frères resteront en contact avec les américains notamment en achetant des brevets de fabrication à Dupont de Nemours, ce qui leur permettra, à la libération, de produire de nouveaux textiles tel le nylon. Il fallait reconstruire le pays et ils ne seront jamais inquiétés. Quelles que soient les vicissitudes de l'histoire, leur ligne de conduite vise le profit !
Le récit de Vincent Borel se caractérise par sa grande rigueur et sa fidélité à l'histoire. Il s'en dégage au premier abord une certaine froideur car il ne décrit que rarement les sentiments de ses personnages. Cela m'a gênée mais, après réflexion, je trouve que ce choix donne de la force à son récit, en forme de nécessaire devoir de mémoire, hommage à ses grands-parents : d'un côté il y a bien eu les salauds (soutenus, en France, par l'écrasante majorité du patronat français) de l'autre les victimes et nous ne devons jamais l'oublier ...
Une courte interview de Vincent Borel :
http://culturebox.france3.fr/all/27571/un-livre-un-jour-antoine-et-isabelle-de-vincent-borel
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Bonjour ! Je viens te rendre visite pour faire connaissance avant notre lecture commune de"La délicatesse". J'ai lu aussi "Antoine et Isabelle" qui m'a beaucuop intéressée, j'ai appris beaucoup de choses dans ce roman ! Une libraire m'a conseillé de lire plutôt "Le coeur glacé" d'Almudena Grandes, thématiques semblalbles mais plus chaleureux, a-t-elle dit !
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